“Contre l'alter-numérisme”
Recension de l'ouvrage
Une tentative de comprendre la posture technocritique radicale, en quelques ouvrages
Je ne comprends pas la posture technocritique radicale. L'approche de Stiegler autour du Pharmakon me parle : la technique en général et le numérique en particulier sont capables d'une grande toxicité, et doivent absolument être politisés, c'est à dire discutés, choisis, refusés, encadrés. Mais je ne comprends pas l'approche de Pièces et Main d'œuvre : la technique comme dictature dont il faut impérativement sortir.
Après écoute du podcast "Face au monde-machine", je pars donc en exploration avec 4 livres, pour essayer de comprendre enfin. La question, telle que je la saisis aujourd'hui, peut se poser de la façon suivante. La technique est-elle un outil au service du néolibéralisme (extractivisme, productivisme, capitalisme prédateur...), ou le néolibéralisme est-il un outil au service de la technique (techno-pouvoir, technocratie, trans-humanisme, monde-machine...) ?
Je pars avec l'intuition d'un assemblage de toxicités, comme un couple dysfonctionnel qui empire les défauts de chaque partie, et avec l'espoir d'une technique qui peut-être domestiquée, convivialisée. J'aimerais assez ne pas trop me tromper sur ce sujet, parce que ça fait 20 ans que je construis un savoir-faire artisanal sur le numérique, et que je n'ai en revanche aucune compétence en permaculture.
Face au monde-machine est une série de podcasts avec les Grenoblois de Pièces et main d’œuvre - lien externe (PMO). Plongez dans la riche aventure intellectuelle et historique de l’écologie anti-industrielle grâce à cet entretien techno-critique au long cours. Depuis vingt ans, Pièces et main d’œuvre ont publié une quinzaine de livres. Pour tout écologiste attaché à la nature et à la liberté, leur travail est aussi important que passionnant. Afin d’en rendre compte correctement, il nous fallait un format un peu plus grand que d’habitude. Voilà pourquoi, au mois de juillet 2022, nous sommes allés discuter trois fois avec PMO à Grenoble, au Chimère Café - lien externe – que l’on remercie pour l’accueil. Nos entretiens sont restitués ici sous forme de feuilleton. Pour PMO « la technocratie est la classe du savoir, de l’avoir et du pouvoir produite par le capitalisme industriel pour révolutionner constamment les produits, services et moyens de la puissance ». Et « le transhumanisme est l’idéologie de la technocratie à l’ère des technologies convergentes, et à l’avènement du règne machinal ». Mais pour bien comprendre tout cela, il faut du temps. Au cours des différents épisodes, nous ferons connaissance avec PMO, avec leur méthode de travail. Nous ferons plusieurs voyages dans le temps, dans l’histoire de l’industrialisation de Grenoble, celle de la volonté de puissance, de l’eugénisme, du transhumanisme, de « l’emballement des technologies convergentes nous mènant au règne machinal et à l’incarcération de l’homme-machine dans le monde-machine ». Préparez-vous, il y a beaucoup à explorer ensemble.
L’alternumérisme a le vent en poupe : cyberminimalisme, smartphones équitables, inclusion numérique, ateliers de détox digitale, logiciel libre, open data, démocratie en ligne, neutralité du net… ils sont nombreux à croire, (ou à vouloir nous faire croire), que la nouvelle économie de l’information pourrait tourner à l’avantage de tous ou, du moins, qu’on pourrait en contenir les effets les plus néfastes. Ce livre détruit méthodiquement cette théorie dangereuse, appelle à s’extraire de l’utopie numérique, à refuser la numérisation du monde.
— Julia Laïnae, Nicolas Alep
Essai sur l'identification électronique et les motifs de s'y opposer
Ce que nous avons tenté de démontrer dans ce livre, c'est qu'Internet n'est pas — ne peut pas être — un outil convivial. Nous ne pensons mente pas qu'il s'agisse d'un outil, d'ailleurs x c'est un système, une mégamachine qui structure, qualifie, organise nos vies dans le sens d'une hétéronomie accrue — une addiction à plus d'électricité, plus de métaux rares, plus de temps passé devant un écran plutôt qu'en contact physique avec nos semblables... Nous ne voulons pas défendre les droits de l'Homme dans la société numérique nous voulons défendre la condition humaine qui est menacée par la société numérique. Nous pensons que la défense de la liberté et de l'égalité implique de réduire massivement notre usage des artefacts numérique et de recréer un monde où l'on puisse s'en passe. Cette position relève apparemment du tabou aujourd'hui, et ceci jusque dans la plupart des cercles se présentant comme anticapitalistes, révolutionnaires, ou en lutte contre toutes les formes de domination.
— Groupe Marcuse
Critique du développement exponentiel
Dans ce livre majeur, Charbonneau analyse finement la dialectique entre contrôle et chaos qui prévaut dans nos sociétés modernes. Obsédé par l’immédiat, la victoire ou le profit, le Léviathan technico-industriel, dont les moyens croissent de manière exponentielle, n’enregistre ses effets sur la vie, les sociétés et les personnes qu’après coup et souvent trop tard ; c’est ainsi qu’il perturbe gravement les milieux naturel et social et fait naître crises, guerres, et chaos. Or, faisant peser le risque de désorganisation sociale, ce chaos appelle en retour un ordre strict, une organisation totale, si ce n’est totalitaire, de la vie sociale, collective et personnelle pour tenter de résorber ses effets néfastes. Ainsi naît la dialectique entre système et chaos. Pour Charbonneau, convaincu qu’il n’y a de liberté que dans des actes personnels, un tel avenir est inacceptable. Pour l’éviter, une prise de conscience est indispensable ; ce livre prémonitoire nous y incite.
— Bernard Charbonneau
Dans cet ouvrage, synthèse de la réflexion consacrée par Jacques Ellul à la technique, l’auteur s’attache à démystifier le discours sur les changements technologiques qui fleurissent dans notre société. Écrit avant l’explosion informatique et communicationnelle des années 1980, il en anticipe l’arrivée, les utopies et les déconvenues. Plaidant pour une technique au service de l’homme contre une société qui asservit l’individu à une multiplicité de gadgets, il démonte avec minutie et conviction les arguments qui font de la technologie une fatalité. Manifeste pour une technique au service de l’homme, ce livre est un grand classique de la critique de la technique.
— Jacques Ellul
Je rendrai compte de ces quatre lectures ici :)
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